Úterý, 7. října 2025

La République tchèque sera-t-elle sans électricité en 2040 ?

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PRAGUE – L’avenir de l’énergie tchèque est incertain. Alors que le gouvernement résout les complications liées à l’appel d’offres pour la fourniture de nouveaux réacteurs nucléaires à Dukovany, les experts en énergie s’inquiètent de plus en plus et mettent en garde contre des erreurs systémiques qui pourraient avoir des conséquences imprévisibles pour le pays. Jaroslav Míl, qui connaît parfaitement le sujet en tant qu’ancien directeur de ČEZ et représentant du gouvernement, a tiré la sonnette d’alarme dans une interview accordée à Pavel Janeček pour l’émission Průmyslová zóna (Zone industrielle) sur la plateforme FocusOn. Son analyse montre une situation alarmante et appelle à une action immédiate.

Le modèle hybride de ČEZ, un frein et un piège financier

L’un des problèmes centraux soulevés par Míl est la structure actuelle de ČEZ, dont l’État détient environ 70 % des actions, le reste étant coté en bourse. Selon lui, ce « modèle hybride d’entreprise semi-publique » conduit à un conflit d’intérêts. « L’énergie est un secteur à long terme qui nécessite des investissements à long terme. Annoncer qu’aucune dividende ne sera versée pendant les cinq à dix prochaines années en raison d’investissements dans le nucléaire ne devrait pas poser de problème », affirme Míl, laissant entendre que les intérêts des actionnaires minoritaires en matière de dividendes peuvent freiner les investissements stratégiques.

Mais Míl critique surtout le mode de financement du projet de nouvelles tranches. Selon lui, l’hypothèse initiale selon laquelle ČEZ évaluerait sa participation dans la filiale Dukovany II à plus de 10 % d’intérêt annuel, tandis que l’État fournirait des fonds à taux zéro, était absurde. Même l’accord final, qui prévoit un taux d’intérêt de 0 %, puis de 4 % plus l’inflation après le lancement, est problématique. « Dans le domaine des centrales nucléaires, le coût le plus élevé est celui de l’argent et du temps. Une augmentation du rendement de 2,5 points de pourcentage a le même impact qu’une augmentation des coûts d’investissement d’un tiers », prévient M. Míl. Pavel Janeček ajoute que si le projet est acheté par l’État, il s’agit de l’argent des contribuables, et non de celui de ČEZ, ce qui fait de cette affaire une question hautement politique.

L’absurdité d’une participation de 20 % de ČEZ et une notification « extrêmement mauvaise »

Míl critique vivement la décision de laisser ČEZ conserver une participation de 20 % dans le projet. « C’est absolument absurde. L’État devrait racheter la totalité des parts, ce qui résoudrait le problème de la notification et des relations avec l’Union européenne », suggère-t-il. Selon lui, une propriété publique à 100 % garantirait une énergie moins chère pour les citoyens, avec des coûts de production inférieurs à 50 EUR/MWh, ce qui contraste fortement avec les estimations de 100 EUR/MWh dans le modèle actuel.

Le problème clé est la notification à la Commission européenne, qui évalue le montant de l’aide publique. « La notification pour le cinquième bloc est extrêmement mal faite », constate M. Janeček, ajoutant qu’elle est invalide en raison du changement de modèle d’investissement et qu’elle doit être renouvelée. Míl ajoute que le rachat des 20 % restants simplifierait la situation. Selon les experts, le contenu de la notification est également absurde, car il prévoit la vente de 70 % de l’électricité sur les marchés à court terme via la bourse, ce qui ne fait qu’augmenter le prix du produit final.

Complications de l’appel d’offres et fiasco géopolitique

L’entretien a également abordé les problèmes actuels liés à l’appel d’offres. Míl soutient l’évaluation initiale, qui désignait la société coréenne KHNP comme gagnante. Selon lui, les problèmes de la société française EDF résidaient dans le fait qu’elle ne fournissait pas de bloc avec une licence valide, même dans son pays d’origine. La situation actuelle, dans laquelle les Français se plaignent en Europe, est selon Míl pour la partie coréenne « un fiasco d’une telle ampleur qu’il sera très difficile à surmonter ». Il propose une solution politique : mettre fin à l’appel d’offres pour des raisons de sécurité ou conclure un accord intergouvernemental.

Jádro v hledáčku kritiky: Realita, mýty a budoucnost české energetiky

Prévisions alarmantes : nous n’avons nulle part où nous approvisionner

Les prévisions de Míl en matière de sécurité énergétique sont particulièrement inquiétantes. « En 2040, la République tchèque devra importer 30 % de son énergie. Si vous regardez la carte, tous les pays voisins connaîtront la même pénurie que nous. Il en résulte que nous n’avons nulle part où importer », prévient-il. Il critique également la lenteur de l’administration publique et la politique énergétique nationale, qui manque d’objectifs et de délais concrets.

Les experts s’accordent à dire que la politique énergétique européenne n’est pas guidée par les lois de la physique ni par la recherche d’une énergie bon marché et accessible. « Nous sommes à un tournant de l’histoire de l’énergie tchèque », souligne Janeček. Míl conclut par un appel : « Il n’est pas nécessaire de réfléchir et de faire appel à des consultants. Il faut commencer à agir, car le temps passe et les heures jouent contre vous. Il ne sert à rien d’attendre. La situation ne peut qu’empirer. »

Selon les experts, la République tchèque n’a que deux options réalistes : soit mettre immédiatement fin à l’appel d’offres actuel et opter pour un accord intergouvernemental, soit risquer un avenir dans lequel elle ne sera pas en mesure de fournir suffisamment d’énergie à ses citoyens et à son industrie.